Mon cher jardin,
Tu étais situé au pied du château d’eau de Cravant, d’une superficie de 1300m2 environ et en forme de L avec deux points d’eau !
Tu étais aménagé ainsi : à un bout, un fructueux verger planté d’arbres dits «de plein vent» (Montmorency, Early plus précoce, des pruniers Reine Claude et Mirabelles, un abricotier, deux pêchers, un cognacier, un pommier), en face des fruitiers en espalier qu’il fallait tailler au sécateur deux fois par an pour avoir des fruits (à couteau) (poires William et reinettes grises, délicieuses !), à côté, des groseilliers, des cassissiers, des framboisiers étaient installés en jonction avec le potager.
Ah ! le potager !
Je revois encore ces rangées de petits pois en fleur, de haricots verts et blancs (beurre), les carottes, les navets rutabagas et les blancs, betteraves rouges, céleris, radis, salades, oignons, échalotes, ail, les pieds de tomates fixés par des piquets et des fils de fer, des choux pommes, fleurs, Bruxelles.
Dans un petit coin, on y trouvait des herbes aromatiques : thym, laurier, persil, ciboulette, je crois que rien n’y manquait !
Les pommes de terre occupaient une plus grande partie. C’était un vrai bonheur que de venir les arracher avec la charrue et le tracteur au début de septembre. On remplissait les sacs en toile de jute pour les stocker dans le cellier (à l’abri du gel) pour l’hiver.
Maman avait aussi installé une serre afin de faire ses semis précoces.
Au moment de la récolte, elle s’affairait, elle n’avait pas les deux pieds dans le même sabot, Maman !!
Les fruits d’abord, il ne fallait qu’ils s’abiment !
Elle en a rempli des bocaux de fruits au sirop, mijoté des confitures, des gelées, des marmelades, des tartes, des clafoutis, les cassis servaient à faire de la liqueur ou du sirop ! Comme elle aimait faire tout ça !!!
Les légumes également étaient mis en bocaux ou bien congelés, tels les haricots verts. Oh ! la cave était bien garnie, les étagères en croulaient, on aurait pu y tenir un siège en temps de guerre ! Avec les quelques bouteilles et verrines de pâté.
Maman était courageuse et téméraire, elle s’était même essayée à cultiver des griffes d’asperges et des melons. Certaines fois, elle était très fière d’avoir réussi, mais le beau temps n’était pas toujours là, ça ne réussissait pas à tous les coups.
En période hivernale, tu étais labouré, il fallait laisser la terre se reposer ! Je revois encore ces sillons brillants !
Ah jardin ! Que de bons souvenirs ! Si maman n’était pas à la maison, on savait où la trouver ! A la fin de sa vie, maman avait le dos cassé, pas étonnant ! C’était une terrienne jusque dans l’âme ! Et on peut dire que ça lui a collé au corps et au cœur toute sa vie !!
Maintenant les temps changent, tes arbres après soixante ans de production intense sont épuisés, on a dû les abattre et ton verger a laissé place à une construction, ainsi que ton potager !
Ainsi va la vie, restent les souvenirs !
Michelle