Chère employée,
Cela fait cinq années à présent que je croise votre silhouette les jours de classe. Vous laissez votre « bagnole », comme vous dites, à distance respectueuse de peur de salir ma pierre, c’est tout à votre honneur ma sœur. Malgré votre délicate attention et votre regard si enthousiaste le matin et, je l’avoue, plus fatigué le soir, je sais que vous ne venez pas jusqu’au quai du mail pour mes beaux yeux. Le style, fin XIXème, les moustaches et la raie au milieu du crâne ne vous conviennent pas. Mais pour moi peu importe, appréciez-vous au moins mes textes ? Je n’en suis pas sûr. J’ai l’impression que mes chansons ne vous inspirent pas grand-chose si ce n’est un vague sentiment nostalgique ,sans doute dû à vos origines paysannes que vous cachez assez mal d’ailleurs. M’enfin, ma sœur, ne pourriez-vous pas tourner votre tête vers moi, lorsque vous descendez casser la croûte ? Est-ce réellement la faim qui vous tenaille ? Pourquoi être si pressée, je suis sûr que vous n’avez même pas un peu de vin du pays dans votre besace. Peut-être est-ce la vue de ma voisine, la fascinante Loire ? Celle-là, elle prend toute la place. Mais finalement, je me demande si c’est pas plutôt de s’parlotter avec votre Annie qui vous préoccupe plus que le reste ! A moins que ça soit les pauv’s drôles que vous avez dans la tête !
Allez, je ne vous en veux pas, mais la moindre des choses est que vous promettiez de ne pas m’oublier quand vous aurez déménagé ! N’allez pas échanger mon buste contre une borne d’autoroute lorsque vous serez dans votre nouveau collège !
A c’ souér
Le buste du gars qu’a mal tourné