Lettre 212 : De Valérie à la brume

  • Canton : Beaugency
  • Commune : Beaugency

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Chère Brume,

Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vues.
Tu as cette fâcheuse habitude de surgir brusquement, sans prévenir. Blanche et opaque sous les faisceaux des phares, laiteuse et douce à l’aurore, toujours très calme, entière, paisible… indifférente.
Tu passes trop vite.
Je n’ai pas le temps de te connaître.
Tu dissimules tout, cachottière. Tu te nourris des mares, gourmande. Mais hop !, un coup de corne te déchire, un sabot t’écrase, tu colles à la fourrure, à l’écorce, aux feuilles, aux carapaces, et tu en joues, tu t’amuses avec.
Tu t’accroches à l’air.
Tu prends de la place.
Tu t’étales.
Avec toi tout est plus lent, silence.
Tu es froide, inquiétante ; je ne sais pas ce que tu caches.
J’ai toujours été jalouse ; ton silence suffit.
Tu règnes sur l’aube, et sur le coucher ; entre chien et loup, entre terre et pas-tout-à-fait-ciel, on se croise, trop peu souvent.
Je voulais te dire que tu me manques, mais c’est peut-être bien que tu gardes tes mystères, sorcière.
J’aurais peur que tu m’avales.

Valérie