Bonjour,
Je ne vous parlerai pas de la Beauce qui grelotte sous un épais manteau blanc. C’est, paraît-il, magnifique, éblouissant, féerique. Mais, je ne connais pas ce paysage. Il faut dire que je suis un migrateur qui revient chaque printemps, avec grand plaisir, dans ce plat pays.
Portée par mes ailes graciles et ma queue fourchue, je regagne, avec les beaux jours, mon nid de terre accroché sous la gouttière de la grange de mes protecteurs, les fermiers. Ils savent que je suis d’une espèce protégée et surveillent ma venue, annonciatrice de la reprise d’une activité agricole intense.
Lorsque mon long voyage s’achève, mes yeux s’écarquillent de joie en découvrant ces grandes étendues aux verts variés : anisé pour l’orge, tendre pour le blé, plus soutenu pour le blé dur. Celui du colza s’agrémente d’un jaune éclatant ! La terre brune a accueilli depuis peu les graines de maïs ou de tournesol qui produiront les soleils de l’été. Par-ci, par-là, un bouquet d’arbres sert de refuge à mes amis, les oiseaux sédentaires.
Même si j’apprécie ma villégiature d’hiver et ma traversée des riches paysages de France, variés à souhait, c’est en Beauce que j’aime me poser. L’été y est une saison merveilleuse pour mes vols planés au-dessus des océans ocres, jaunes ou beiges selon les céréales. Les ailes du vent me portent parfois jusqu’à un champ de maïs encore bien vert et grâce aux rampes d’arrosage, je peux étancher ma soif sans aucun souci. Pour la nourriture, tout est à disposition…
Quand les moissons avec leur effervescence et le bruit assourdissant des machines sont achevées et que les jours commencent à raccourcir, mes amies et moi, nous nous rassemblons sur les fils électriques, préparant notre grand départ. Les Beaucerons disent alors que nous annonçons le retour de l’automne.
Et puis, un jour, toutes ensemble, nous prenons notre envol, délaissant cette région qui attendra notre retour le printemps suivant. C’est merveilleux d’avoir la vue qui porte si loin. Les maisons se transforment en minuscules points et la terre redevenue brune disparaît pour un grand voyage vers les terres lointaines…
Si vous ne connaissez pas le grenier à blé de la France, venez y passer quelques semaines, vous pourrez apprécier ces ciels à nuls autres pareils, qu’un artiste local, Jean Feugereux a peint avec la palette du cœur. Et vous verrez ainsi que cette région est un tableau vivant dont les teintes vibrent au fil des saisons. N’hésitez pas !
La petite hirondelle.