Lettre 285 : De résidents du Parc des Mauves à l’eau courante

  • Canton : Meung sur Loire
  • Commune : Huisseau sur Mauves

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Chère eau courante,

Ah ! Comme tu as changé nos vies ! Quand nos parents étaient petits, il n’était pas question de ça : ils allaient au puits, avec les gros seaux en zinc de quinze litres. Et puis, comme dit Pierre : « il y avait la Loire ».
Là où il était secrétaire de mairie, à Guilly, l’adduction a dû être réalisée en 1927 parce que, quatre ans plus tard, la commune n’avait pas fini de rembourser l’emprunt. Mais, à Ouzouer-le-Marché, tu n’es arrivée dans les fermes que dix ans après. Parfois tu étais accompagnée de pompes, parfois d’un château d’eau. Maintenant on peut aller te chercher jusqu’à 70 mètres de profondeur, comme chez Roger.
Celles qui ont été heureuses de t’avoir « sur l’évier », ce sont les mères de famille, à cause de la corvée de lessive. Elle se déroulait généralement le lundi. Certains d’entre nous ont de vagues souvenirs des lavoirs sur la rivière. Dans l’ensemble, ça se passait plutôt à la buanderie. On triait le linge, on faisait bouillir le blanc et puis, dans un grand baquet, on y allait de la brosse à chiendent sur la « selle à laver » (la planche) et du battoir. Le bleu, que l’on ajoutait en petits cubes, dégageait cette bonne odeur de frais que nous aimions. Avant, on utilisait de la cendre dont les phosphates blanchissaient le linge. Pendant la guerre, en raison des restrictions, on avait recours à la saponaire, cette plante à fleurs roses que l’on trouve sur les talus.
L’un d’entre nous, nous a parlé d’un curieux appareil fabriqué en châtaignier et qui s’appelait la « coide ». On la posait au bord du seau, légèrement en pente, histoire de récupérer les précieuses gouttes qui débordaient du seau. Quand le dernier artisan a arrêté, on en a même fabriqué en zinc.
Pour nous, même avec ces belles commodités que nous a apportées le modernisme, tu es restée précieuse.

Résidents du Parc des Mauves.