Lettre 354 : De Véronique à ce pays qui n’est pas le sien

  • Canton : Beaugency
  • Commune : Beaugency

Voir toutes les lettres

Lettre à ce pays qui n’est pas le mien.

Sous ton ciel et dans ta lumière, il m’arrive de prendre le temps, et la nostalgie m’envahit.
Je ne suis pas d’ici.
J’aspire à sentir l’air vif des monts, à parcourir les vastes étendues doucement arrondies des prairies, à m’éblouir de la couleur des champs de narcisses au printemps, de colchiques à l’automne.
Je rêve de longues balades ponctuées par l’aboiement des chiens dans les hameaux que je traverse, de paysages sans cesse renouvelés au détour du chemin.
Pourtant c’est ici, sur ta terre ligérienne, que j’ai donné la vie, quatre fois, avec un bonheur toujours renouvelé. Egrainant les naissances d’Orléans à Blois en passant par Beaugency.
C’est ici que je connais le plaisir d’aimer et d’être aimée, la joie du partage des idées qui m’ouvre et me fait grandir, la richesse de l’engagement qui donne sens à mes convictions.
C’est ici que je me sens vivante jusque dans la douleur du rejet et de l’abandon, la souffrance de l’amitié trahie, la mesquinerie des certitudes affichées.
C’est ici que mes enfants sont ancrés, traçant leur propre chemin sur les berges de ton fleuve. Leurs jeunes aventures vécues, ils sont revenus planter à leur tour leurs espérances dans ta lumière si particulière.
C’est ici, tout près, que mes parents accueillent sereinement les jours, jouissant des valeurs sans cesse ajoutées à la cellule qu’ils ont constituée.
C’est ici que la vie me façonne depuis plus de trente ans, le temps et l’expérience apportant la distance et la modération nécessaires à mon équilibre. La fougue est toujours présente, prête à bondir devant l’injustice, le manque de respect, tout ce qui nie ou rabaisse l’Homme.
Et finalement, si j’étais d’ici ? Et si tu étais mon pays ?
Tu es plat, et alors !

Véronique